Pros : Prescrire, janv. 2022 : médicaments utiles et inutiles

Par le 7 mars 2022, actualisé le 19 Fév 23.

Chaque mois, la revue indépendante Prescrire passe en revue les médicaments nouvellement commercialisés, ainsi que les nouvelles indications de médicaments déjà sur le marché. Elle en discute les mérites et démérites, par comparaison avec les autres traitements disponibles. Voici les médicaments qu'elle a examinés dans son numéro de janvier 2022.

POUR LES PROS :
L'article qui suit est complexe, et traite de maladies relativement rares. Il intéressera surtout les professionnels de santé, ainsi que les personnes atteintes par ces maladies et leurs proches.

En France comme dans de nombreux autres pays, pour commercialiser un médicament, il faut démontrer qu'il est plus efficace qu'un placebo (a). Ses bénéfices potentiels doivent aussi sembler supérieurs à ses effets indésirables aux yeux de l'agence du médicament.
La rédaction Prescrire compare les effets cliniques des médicaments à ceux des autres traitements disponibles et les classe en six catégories, en fonction de leur utilité. Voici les évaluations Prescrire des nouveaux médicaments dans le numéro de janvier 2022 (réf. 1).

Les médicaments sont nommés par leur dénomination commune internationale, autrement dit, par le nom que leur donne l'OMS (sans majuscule, en italiques). Le nom de marque est éventuellement indiqué entre parenthèses et marqué d'une majuscule et du signe °. Lire à ce sujet l'article "Le véritable nom des médicaments".

Bravo : 0 (zéro) - progrès thérapeutique majeur dans un domaine où nous étions démunis

Rien en janvier 2022

Intéressant : 0 (zéro) - progrès thérapeutique important, mais avec certaines limites

Rien en janvier 2022

Apporte quelque chose : 1 (un) - apport limité

- pertuzumab + trastuzumab (Phesgo°) en injections sous-cutanées, dans certains cancers du sein. Plus rapide à injecter que par voie veineuse. Les bénéfices ne semblent supérieurs aux risques qu'en cas de cancer du sein non opérable.

Éventuellement utile : 0 (zéro) -intérêt thérapeutique supplémentaire minime

Rien en janvier 2022

Décrits sous l'angle de leurs propriétés pharmacologiques ou de leur mode de production innovant, certains médicaments peuvent sembler attirants. Mais ils ne représentent pas forcément un progrès pour la santé des patients.

N'apporte rien de nouveau : 7 (sept) - substance sans plus d'intérêt clinique que les autres substances déjà disponibles

- upadacitinib (Rinvog°) dans le rhumatisme du psoriasis. Le psoriasis (maladie de peau) s'accompagne parfois de rhumatisme. Parfois, le traitement de premier choix (le méthotrexate) ne suffit pas. Dans cette situation, il n'est pas démontré que l'upadacitinib fait mieux que d'autres immunodépresseurs plus anciens et mieux connus.

- ofatumumab (Kesimpta°) dans la sclérose en plaques avec poussées. Ce médicament a malheureusement été commercialisé sans avoir été comparé à l' interféron alfa, qui est le traitement de premier choix dans cette situation. Et il fait courir tous les risques d'un immunosuppresseur.

- acalabrutinib (Calquence°) dans la leucémie lymphoïde chronique. Dans ce cancer du sang, lorsqu'un premier traitement n'a pas suffi, il n'est pas démontré que l'acalabrutinib fait mieux que le traitement par d'autres médicaments anti-tumoraux, comme l'ibrutinib.

- amikacine (Arikayce liposomal°) en inhalations buccales, dans les infections pulmonaires par mycobactéries. En ajout à d'autres antibiotiques, elle n'a pas semblé diminuer la mortalité. Elle n'a pas été comparée à l'amicakine en perfusion. Et ses effets indésirables sont nombreux, fréquents et parfois graves.

- olaparib (Lynparza°) dans certains cancers de la prostate avec métastases. Cancers métastasés avec mutation BRCA, après échec d'un autre traitement. Les données sont limitées à un seul essai sur 245 patients, sans aveugle, et avec des problèmes méthodologiques.

- lénalidomide (Revlimid°) dans le lymphome folliculaire (réfractaire ou en rechute). Un essai fragile contre placebo, mais pas d'essai contre d'autres traitements possibles.

- indacatérol + mométasone (Atectura Breezhaler°) dans l'asthme persistant. Un bronchodilatateur et un dérivé de la cortisone de plus, qui n'apportent aucun progrès dans le traitement de l'asthme.

Pas d'accord : 0 (zéro) - aucun avantage évident, mais des inconvénients possibles ou certains

- Rien en janvier 2022

La rédaction ne peut se prononcer : 2 (deux)

- dupilumab (Dupixent°) dans l'exéma sévère chez les enfants à partir de 6 ans. C'est un médicament immunosuppresseur. Chez les enfants, il a une certaine efficacité (comme chez les adolescents ou les adultes). Mais l'exéma de l'enfant s'améliore souvent seul avec le temps. Et le dupilumab pourrait faire courir des risques d'infection, de cancer et de retard de croissance, encore trop mal connus.

-selpercatinib (Retsevmo°) dans certains cancers des bronches ou de la thyroïde. Ce médicament n'a été étudié que sur de courtes périodes (14 à 20 mois), et de manière non comparative. Il permet la diminution de la taille de la tumeur chez certains malades, mais il est impossible de dire s'il allonge la durée de vie.

Je recommande à tous les professionnels de santé de ne pas se contenter des informations limitées de ce blog et d’aller lire les arguments détaillés à la source.

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a- Un placebo est "une substance sans principe actif (= sans effet pharmacologique) mais dont la prise peut avoir un effet psychologique bénéfique pour le patient" ou encore (autre définition) "une préparation dépourvue de tout principe actif, utilisée à la place d'un médicament pour son effet psychologique, dit effet placebo" (ref. 2). À noter qu'un placebo ou un médicament peut aussi avoir des effets négatifs, et provoquer des effets indésirables : c'est l'effet nocebo.

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Lire aussi :

- Les objectifs des traitements et des diagnostics
- Traitements : les essais comparatifs sont indispensables
- Incertitude
- Quatre histoires de placebos ou de nocebos

Sources

1- Prescrire Rédaction “Rubrique : Le rayon des nouveautés" Rev Prescrire 2022 ; 42 (459) : 4-20.
2- Prescrire Rédaction “Essais cliniques versus placebo : divers types de placebos, dits purs, impurs voire faux placebos" Rev Prescrire 2020 ; 40(442) : 621-624.

Crédits photo :

Image n°1 : "Pharmacy medication shop market stall Yangon" par Insights Unspoken sur Flickr
Image n°2 : "Tablet Background" 1254a par Patrick Hoesly sur Flickr

Rédigé par sans lien d'intérêt, notamment avec les firmes pharmaceutiques, leurs officines de communication, l'assurance maladie et les compagnies d'assurance ou mutuelles.

CITER: Jean Doubovetzky "Pros : Prescrire, janv. 2022 : médicaments utiles et inutiles" ; 07 Mar 2022 ; site internet Anti Dr Knock (https://anti-knock.fr/blog-medicaments/pros-prescrire-janv-2022-medicaments-utiles-et-inutiles/)
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