Avant de discuter de réformer ou de supprimer l’aide médicale d’État, il est important de savoir de quoi il s’agit vraiment.
Qui a droit à l’AME
En France, en 2023, l’aide médicale d’État (AME) est réservée à certaines personnes étrangères. Avant sa création, les bénéficiaires bénéficiaient de la couverture maladie universelle (CMU), qui était alors véritablement universelle. L’AME a précisément été créée pour diminuer les droits des personnes étrangères en situation irrégulière.
L’admission à l’AME est donc limitée aux personnes étrangères :
- résidant en France depuis plus de trois mois (sauf pour les mineurs… à condition qu’ils soient reconnus mineurs)
- sans titre de séjour depuis plus de trois mois
- et dont les ressources sont inférieures à 810 € pour une personne seule en France métropolitaine (les plafonds sont plus élevés dans les DOM).
Les ayant-droits des assurés à l’AME sont leurs enfants, conjoints, partenaires de PACS ou concubins.
Que recouvre l’AME
L’AME permet la plupart des soins en tiers-payant (mais un certain nombre de professionnels de santé les refusent, bien que ce soit illégal).
Il y a cependant quelques exclusions. Ne sont pas pris en charge par l’AME : la procréation médicalement assistée, les médicaments à faible service médical rendu (habituellement remboursés à 15%), les médicaments princeps (de marque) lorsqu’il existe un générique, les cures thermales.
Un certain nombre d’interventions chirurgicales ne sont prises en charge qu’après au moins 9 mois, par exemple la chirurgie de la cataracte, du canal carpien (au poignet) ou la pose de prothèses.
Autres restrictions :
- Le dispositif dit « 100 % santé » (audio, soins dentaires et optiques) n’est pas accessible aux personnes ayant l’AME. Ils peuvent donc avoir à payer un « reste à charge » pour des prothèses auditive, des soins dentaires ou des lunettes. Ou pour des dépassements d’honoraires (qui sont en principe interdits pour les bénéficiaires de l’AME, et pourtant souvent pratiqués).
- Les bénéficiaires de l’AME ne sont pas inclus dans les campagnes nationales de dépistage (par exemple pour le cancer du côlon).- Ils n’ont pas de compte AMELI (compte internet à l’assurance maladie) et ils ne peuvent pas avoir de médecin traitant. Ces mesures rendent leurs soins plus complexes, interdisent aux professionnels de santé de vérifier leurs droits lorsque, par exemple, la carte d’AME a été oubliée, et diminuent la rémunération des médecins qui s’occupent d’eux. Autant de détails qui conduisent un certain nombre de médecin à refuser les bénéficiaires de l’AME.
Quelques conséquences
Pendant le délai de carence de 3 mois, les futurs assurés à l’AME ont en principe droit aux soins urgents dans les hôpitaux, mais le manque de personnel des services d’urgence rend ce droit de moins en moins effectif.
D’autre part, l’absence de compte AMELI et l’absence de dispositif "médecin traitant" pénalise les médecins (qui sont moins bien rémunérés), ce qui encourage les refus (illégaux) de soins.
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Lire aussi :
- "Aide médicale d’État : la course d’obstacles"
- "Inégalités de santé"
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Sources :
- Direction de l'information légale et administrative (Première ministre) "Qu'est-ce que l'aide médicale de l'État (AME) ?" Mise à jour le 01 avril 2023, site officiel de l’administration française www.service-public.fr
- Evin C, Stefanini P "Rapport sur l’aide médicale de l’État" décembre 2023, 106 pages.
- Latournerie J-Y et coll. "L’aide médicale d’État : diagnostic et propositions" octobre 2019, 158 pages.
- Prescrire rédaction "Étranger·ères “indésirables” : moins de droits, avec quelles conséquences de santé ?", Prescrire 2023 ; 43 (476) : 475-476.
Crédits photo :
- Image 01 : "Sans_Abri2" par Margaret Griffin sur Flickr (recadré).
- Image 02 : "Sans abri en France" par Didier et Marie Ruppe Rolland sur Flickr (recadré)