Pros : Prescrire, mars 2025 : médicaments utiles et inutiles

Par le 12 septembre 2025, actualisé le 08 Oct 25.

Chaque mois, la revue indépendante Prescrire passe en revue les médicaments nouvellement commercialisés, ainsi que les nouvelles indications de médicaments déjà sur le marché. Elle en discute les mérites et démérites, par comparaison avec les autres traitements disponibles. Voici les médicaments qu'elle a examinés dans son numéro de mars 2025

En France comme dans de nombreux autres pays, pour commercialiser un médicament, il faut démontrer qu'il est plus efficace qu'un placebo (a). Ses bénéfices potentiels doivent aussi sembler supérieurs à ses effets indésirables.
La rédaction Prescrire compare les effets cliniques des médicaments à ceux des autres traitements disponibles et les classe en 6 catégories, en fonction de leur utilité.Voici les évaluations Prescrire des nouveaux médicaments dans le numéro de mars 2025 (réf. 1).

Les médicaments sont nommés par leur dénomination commune internationale, autrement dit, par le nom que leur donne l'OMS (sans majuscule, en italiques). Le nom de marque est éventuellement indiqué entre parenthèses et marqué d'une majuscule et du signe °. Lire à ce sujet l'article "Le véritable nom des médicaments". Les prix indiqués proviennent de Prescrire ou du dictionnaire Vidal et sont arrondis à l’euro le plus proche. Le prix n’est généralement pas connu pour les médicaments réservés à l’hôpital ou non remboursables.

Bravo : Aucun - progrès thérapeutique majeur dans un domaine où nous étions démunis

Rien en mars 2025

Intéressant : Aucun - progrès thérapeutique important, avec certaines limites

Rien en mars 2025

Apporte quelque chose : Aucun – Un apport limité

Rien en mars 2025

Éventuellement utile : Aucun - intérêt thérapeutique supplémentaire minime

- Rien en mars 2025

N'apporte rien de nouveau : 8

- Inclisiran (Leqvio°) dans certaines hypercholestérolémies. Lorsque dans les analyses sanguines, le cholestérol semble trop élevé malgré un traitement par statine, ajouter de l’inclisiran diminue certes le « mauvais cholestérol » (ou LDL-cholestérol), mais il n’a pas d’effet démontré sur les complications cardiaques ou vasculaires. On ne sait pas non plus s’il diminue le mauvais cholestérol plus que l’alirocumab ou l’évolocumab. Et il a bien entendu des effets indésirables (atteinte du foie ou des muscles, réactions allergiques, etc.)
- Alirocumab (Praluent°) dans certaines hypercholestérolémies. Chez les enfants âgés de 8 ans et plus atteints d’une forme génétique d’augmentation du cholestérol (l’hypercholestérolémie familiale hétérozygote), l’alirocumab permet de diminuer le taux de « mauvais cholestérol » (LDL-cholestérol). Mais on ignore s’il permet vraiment de diminuer les complications cardiaques ou vasculaires. Et il n’est évidemment pas sans effet indésirable (réactions allergiques, vertiges, maux de tête…)
- Hydromorphone injectable (Hydagelan°) dans les douleurs cancéreuses, après échec des autres dérivés de la morphine. Ce médicament est 5 à 10 fois plus puissant que la morphine, mais permet-il vraiment de faire mieux qu’une augmentation des doses d’autres morphiniques ? En l’absence d’étude comparative de qualité, on ne sait pas. Or il fait courir le risque de surdoses parfois mortelles.
– Abaloparatide (Eladynos°) dans l’ostéoporose après la ménopause. Chez les femmes ménopausées, pour éviter les fractures liées à une fragilisation des os, la prévention des chutes et le maintien d’une bonne activité physique sont les éléments principaux. Si une fracture survient tout de même, pour en éviter une deuxième, l’acide alendronique est le premier choix (si les apports en calcium et en vitamine D sont corrects). L’abaloparatide ne lui a pas été comparé, de sorte que son utilité réelle demeure inconnue.
– Somapacitan (Sogroya°) dans le manque d’hormone de croissance chez les adultes. En général (mais pas toujours), ce manque d’hormone est lié à une tumeur non cancéreuse qui écrase la glande qui produit l’hormone. Il provoque divers symptômes comme une obésité, une diminution de la force musculaire, des fractures, des troubles cardiaques… Une comparaison entre le somapacitan et un placebo a montré une minime diminution de l’obésité, à vrai dire sans grand intérêt. Et on ne sait pas s’il fait mieux que son concurrent, la somatotropine.
- Rézafungine (Rezzayo°) dans les candidoses invasives. L’invasion de l’organisme par les champignons de type « candida », autrement dit la candidose invasive, est une infection qui atteint surtout les personnes ayant un déficit de l’immunité. Elle est souvent grave. Par comparaison avec la caspofungine, la rézafungine n’a pas permis plus de guérison mais elle a peut-être augmenté le risque de mourir ! Restons-en donc à la caspofungine.
– Foslévodopa + foscarbidopa (Scyova°) en perfusion sous-cutanée dans certaines maladies de Parkinson. Lorsqu’elle est traitée depuis plusieurs années par la lévodopa, de nouveaux troubles peuvent apparaitre : alternance de phases d’amélioration et de blocage musculaire (effet « on-off »), mouvements normaux involontaires. On les traite en général en modifiant le traitement ou en ajoutant du ropinirole. Malheureusement, le principal essai comparatif réalisé n’a pas permis de montrer que le nouveau traitement fait mieux.
– Riociguat (Adempas°) dans les hypertensions artérielles pulmonaires des enfants de plus de 50 kg. Cette maladie rare est habituellement traitée par un médicament qui dilate les vaisseaux, le bosentan. Aucun essai n’a cherché à montrer que le riociguat fait mieux.

Tout nouveau n’est pas tout beau.
Ce n’est pas parce qu’un médicament est nouveau sur le marché qu’il est meilleur ou plus utile que les médicaments qui étaient déjà en vente avant lui. Comme cet article le prouve tristement, le plus souvent, les nouveaux médicaments n’ont tout simplement pas été comparés avec les traitements déjà existants. De sorte que personne ne peut affirmer qu’ils sont meilleurs. Par contre, on peut dire que leurs effets indésirables sont moins bien connus. Dans cette situation, la sagesse est d’en rester aux anciens traitements, dont les risques sont mieux cernés.
On ne joue pas sa santé comme on joue à pile ou face.

Pas d’accord : Aucun

- Rien en mars 2025

La rédaction ne peut se prononcer : Aucun

- Rien en mars 2025

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Mauvaises nouvelles : 1

- Ipilimumab + nivolumab dans les mélanomes avec métastase ou inopérables. Un essai sur plus de 900 patients, avec un suivi de plus de 10 ans, n’a pas montré que cette association allongeait la vie par rapport au nivolumab seul. Mais les patients ayant eu l’association des deux médicaments ont eu beaucoup plus d’effets indésirables sévères… Dommage.

Bonnes nouvelles : Aucune

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a- Un placebo est "une substance sans principe actif (= sans effet pharmacologique) dont la prise peut avoir un effet psychologique bénéfique pour le patient" ou encore (autre définition) "une préparation dépourvue de tout principe actif, utilisée à la place d'un médicament pour son effet psychologique, dit effet placebo" (réf. 2). À noter qu'un placebo ou un médicament peut aussi avoir des effets négatifs, et provoquer des effets indésirables : c'est l'effet nocebo.

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Lire aussi : 
Les objectifs des traitements et des diagnostics
La médecine n'a pas pour but de guérir des maladies
Médicaments à ne pas utiliser : 2024

Sources
1- Prescrire Rédaction “Rubrique : Le rayon des nouveautés" Rev Prescrire 2024 ; 45 (497) : 167-189. 
2- Prescrire Rédaction “Essais cliniques versus placebo : divers types de placebos, dits purs, impurs voire faux placebos" Rev Prescrire 2020 ; 40 (442) : 621-624.

Crédits photo :
Image n°1 : "Vieil homme asiatique aux médicaments" par Jean Doubovetzky sur canva.
Image n°2 : "Coin Toss" (recadré) par ICMA Photos sur Flickr.

Rédigé par sans lien d'intérêt, notamment avec les firmes pharmaceutiques, leurs officines de communication, l'assurance maladie et les compagnies d'assurance ou mutuelles.

CITER: Jean Doubovetzky "Pros : Prescrire, mars 2025 : médicaments utiles et inutiles" ; 12 Sep 2025 ; site internet Anti Dr Knock (https://anti-knock.fr/blog-medicaments/pros-prescrire-mars-2025-medicaments-utiles-et-inutiles/)
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