Selon une synthèse chiffrée (ou méta-analyse), l’activité physique est efficace pour lutter contre la dépression. C’est en particulier le cas de la marche, du jogging et du yoga. Le niveau d’efficacité semble au moins égal à celui des médicaments. Il semble proportionnel à la quantité d’activité physique.
Les auteurs ont compilé l’ensemble des essais avec tirage au sort dans lesquels on a comparé des personnes ayant un diagnostic de dépression que l’on poussait ou que l’on ne poussait pas à pratiquer une activité physique. Plus de 200 essais et plus de 14 000 patients ont été inclus dans cette analyse.
Les médicaments sont nommés par leur dénomination commune internationale, autrement dit, par le nom que leur donne l'OMS (sans majuscule, en italiques). Le nom de marque est éventuellement indiqué entre parenthèses et marqué d'une majuscule et du signe °. Lire à ce sujet l'article "Le véritable nom des médicaments".
L’exercice physique efficace contre la dépression
La marche, le jogging, le yoga et la musculation semblent plus efficaces que d'autres types d'exercices. Il semble y avoir une relation entre l’intensité de l’exercice et l’efficacité anti-dépressive. Cependant, même des exercices de faible intensité comme la marche ou le yoga sont efficaces. Les exercices en groupe ne semblent pas plus efficaces que les exercices individuels, sauf pour le yoga.
L’exercice physique semble efficace quels que soient l’âge, le sexe et la gravité de la dépression au départ.
Aussi bien que la psychothérapie et les antidépresseurs ?
L'effet de l'exercice semble comparable à celui de la thérapie cognitivo-comportementale (TCC) mais les preuves d’efficacité de la TCC sont plus solides. Même chose pour les médicaments antidépresseurs. Il semble que l’exercice physique soit plus efficace que les antidépresseurs de la famille des ISRS (inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine) comme la fluoxétine, la paroxétine et d’autres (a). Mais la quantité et la qualité des preuves montrant l’efficacité des antidépresseurs est supérieure.
D’autre part, il semble que la combinaison de l’exercice physique et de la psychothérapie et la combinaison de l’exercice physique et des antidépresseurs permette une meilleure efficacité.
Se motiver pour pratiquer les exercices physiques
Les exercices physiques présentent de nombreux avantages, car ils contribuent à une bonne santé générale et diminuent les risques ou les conséquences du surpoids, de l’obésité, du diabète de type 2, des maladies cardiovasculaires, etc. À long terme, il est également démontré qu’ils diminuent le risque de rechute dépressive.
Au cours de ces essais, les patients ont généralement été fortement stimulés pour pratiquer des exercices physiques. Dans la vie courante, ce n’est pas toujours facile pour les personnes qui souffrent de dépression. Elle sont souvent fatiguées et elles manquent d’énergie et de motivation. Il est donc important de se motiver pour pratiquer régulièrement des exercices physiques.
Quels exercices choisir ?
On peut envisager la question de deux manières bien différentes. On peut se dire que dans la plupart des cas, les preuves d’efficacité de l’exercice physique ne reposent que sur de petits essais peu fiables. Autant choisir ceux pour lesquels on a les meilleures preuves : la marche et le jogging.
Ou bien on peut se dire que la personne ne ressentira véritablement de bénéfices que si elle pratique ses exercices physiques de manière suffisamment assidue et prolongée. Le meilleur choix est alors celui de l’activité qu’elle préfère, puisque c’est celui qu’elle aura le plus de facilité à entreprendre et à continuer.
a- Les antidépresseurs inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine commercialisés en France début 2024 sont le citalopram (Séropram° et autres), l’escitalopram (Séroplex° et autres), la fluoxétine (Prozac° et autres), la fluvoxamine (Floxyfral° et autres), la paroxétine (Déroxat° et autres) et la sertraline (Zoloft° et autres). En sont très proches la duloxétine (Cymbalta° et autres), le milnacipran (Ixel° et autres) et la venlafaxine (Effexor° et autres).
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
Qu’est-ce qu’une méta-analyse
Une synthèse chiffrée (ou méta-analyse) consiste à rechercher la totalité des données disponibles sur un sujet donné, puis à les combiner selon une méthode précise. Autrement dit, c’est une revue systématique des études disponibles aboutissant à une synthèse statistique.
Selon les cas, les auteurs incluent toutes les études, ou seulement les études jugées les plus fiables. Ce qui explique que plusieurs méta-analyses faites sur le même sujet peuvent conclure différemment, si la méthode employée a été différente.
Qualités et limites de la méta-analyse du BMJ début 2024 sur l’activité physique et la dépression
Qualités. Les auteurs ont recherché tous les essais comparatifs randomisés dans lesquels les participants étaient atteints d’un épisode de dépression dite "caractérisée" selon la définition de la 5e édition du manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux de l’association américaine de psychiatrie (connue sous le nom de DSM 5). Ces essais devaient comparer des patients à qui on avait prescrit et à qui on n’avait pas prescrit une activité physique. Les travaux ont été menés en double et les chercheurs qui ont ensuite confronté leurs résultats.
Limites. La fiabilité de plupart des résultats est qualifiée de moyenne ou faible. De plus, la durée de suivi des essais comparatifs randomisés inclus est relativement faible : elle ne dépasse pratiquement jamais une année. Ces limitations ne sont pas très étonnantes, puisque aucune firme pharmaceutique n'a intérêt à ce type d'essai. Mais elles fragilisent les résultats.
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
Lire aussi :
- La faible efficacité des antidépresseurs
- Traitements psychiatriques chez l’enfant : la grande misère
- Comparer les médicaments : pas n’importe comment
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
Sources :
1- Noetel M et coll. "Effect of exercise for depression: systematic review and network meta-analysis of randomised controlled trials" BMJ 2024 ; 384 : e075847. doi : 10.1136/bmj-2023-075847
2- Bellón JÁ "Exercise for the treatment of depression" BMJ 2024 ; 384 : q320. doi: 10.1136/bmj.q320
3- Bellón JÁ et coll. "Effectiveness of exercise-based interventions in reducing depressive symptoms in people without clinical depression: systematic review and meta-analysis of randomised controlled trials". Br J Psychiatry 2021 ; 219 (5) : 578-587. doi : 10.1192/bjp.2021.5
4- Felipe B. Schuch FB et coll. "Physical Activity and Incident Depression: a Meta-Analysis of Prospective Cohort Studies" Am J Psychiatry 2018; 175:631–648; doi: 10.1176/appi.ajp.2018.17111194
5- Major S "Physical activity reduces risk of depression at any age, finds study" BMJ 2018 ; 361 : k1808 doi : 10.1136/bmj.k1808
Crédits photo :
- Image 01 : "Jogging" par Cuegalos sur Flickr (recadré).
- Image 02 : Jean Doubovetzky, d’après la référence 1.